lundi 31 juillet 2017

Epopée (jour 3 - part 1) : La galère s'amuse



Lorsque je me lève, je sens que la nuit a fait son office car je me sens plutôt en forme. J'ai quand même la gueule horriblement sèche : on a encore bien piccolé la veille. De son côté, Fab n’a pas super dormi et semble soucieux. Il a commencé à avoir mal hier au tendon d’Achille et espérait que cela se résorberait pendant la nuit. Au contraire, il a l’impression que ça a empiré. Je me prépare dans la salle de bain et comme d’habitude, au moment où je reviens, Fab a sorti à peu près toutes ses affaires qu’il a disséminées partout dans la chambre. J’attrape les miennes et descend, laissant mon pote à ses démons.
En bas, il y a évidemment Francky qui est déjà là, discutant avec nos hôtes. Ces derniers nous invitent à passer à table et commencent à nous apporter des victuailles. Et là j’ai la confirmation que la promesse de bon petit déjeuner faite la veille n’était pas en l’air. De délicieuses viennoiseries, de l’excellent pain frais, du fromage, de la charcurterie, Michelle prépare également des oeufs pour ceux qui le souhaitent. On se régale et on se bourre la panse. Décidemment cette endroit est vraiment à la hauteur de nos attentes et représente une halte que je conseille à tous ceux qui s’aventurent dans le coin. 
On se régale déjà avec les yeux

Et tout n'est pas encore là

Après le petit déj, on récupère nos vêtements bien propres et on va préparer les vélos. J’impose un contrôle complet car j’ai repéré que les hautes herbes s’étaient infiltrées dans les dérailleurs. Aidé de mes comparses qui me tiennent les biclous, je dégraisse et nettoie tous les dérailleurs et chaines, puis remet du lubrifiant. Pendant ce temps, Benji répare son super porte-bagage de la rage, sur lequel il a perdu une vis, avec un collier rilsan. Il ne faudrait pas que la barre arrière retenant les deux montants latéraux se fasse la malle. Faby renforce comme prévu son porte-bagage à l’aide de gros rilsans que j’avais emmené. Je les avais utilisés pour renforcer le mien et il n’avait plus bougé depuis. Ce sera le cas également pour celui de Fab.
Fab économise sa cheville

Accrochage de sac

Une fois nos vélos prêts, on remercie une dernière fois nos hôtes et nous mettons en route. On part avec un peu de retard sur l’horaire souhaitée, mais peu importe : il vaut mieux des vélos bien préparés.
Les premiers kilomètres se passent sans accro. On est tous ravis de la bonne soirée de la veille, et comme la météo est toujours très clémente, on se dit qu’à ce rythme on sera sur Dinan entre 12h et 14h. C’est là qu’on souhaite manger le repas du midi. On parle également d’y acheter le repas pour le soir car officiellement on n’avait pas trouvé de resto pour ce soir-là. En effet, le seul resto trouvable par internet est fermé le mardi (décidemment, on est vernis avec les jours de fermetures). Du coup, j'avais demandé à Benji, Fab et Dave de trouver un plan de repli. Fab et Dave on très vite choisi l'option de l'aventure : tous deux estiment que j'ai un peu trop préparé notre Epopée en ne laissant que peu de place à l'inattendu, et sont donc d'avis de cueillir de la bouffe à Dinan le midi, ou tenter à l'arrache le soir en arrivant. Benji, de son coté, nous avait trouvé un plan de repli : Marie, sa copine, pouvait nous rejoindre avec des pizzas. 
Finalement, à force de recherches par google street view (je promenais le bonhomme dans la ville), j’ai fini par trouver une auberge pas très loin juste avant le début de l'Epopée. Je ne l'ai pas dit à mes comparses avant le jour J pour voir s'ils allaient se bouger le fion. Bon, à part Benji, les autres étaient partisans de l'arrache. Entre le repas sauté du premier jour, et la joie d’être bien reçu hier, je reste convaincu que c’est mieux d’avoir notre point de chute le soir et je suis donc content d’avoir trouvé cette auberge. On décide donc de réserver là, mais on garde le plan de Benji au cas où, tout en proposant à Marie de se joindre à nous pour le resto vu qu'elle n'est pas loin.
Bref, le but est de manger à Dinan entre 12 et 14h. On a repéré sur le profil qu’il y avait deux belles saletés à monter, probablement en poussant les vélos, mais que je ne pouvais pas esquiver lors de la préparation de la Trace. Notre but est donc de manger après la première et avant la deuxième, histoire de se motiver entre deux méchancetés. On ne se met pas trop de pression, ça devrait aller.
Sur un chemin entre deux champs, Faby qui est préoccupé par sa cheville, bloque sa roue avant sur une caillasse. C’est le soleil direct. Par chance, il ne se fait pas mal, mais on a eu un peu peur. Cet avertissement lui confirme qu'il est vraiment préoccupé par ce tendon, et lorsqu'on croise une pharmacie, on s'y arrête pour que Fab achète une crème anti-inflammatoire. Dave en profite pour demander un truc pour sa côte et le pharmacien lui explique qu’il peut piquer celle du Fab. C'est curieux qu’il ne lui en revende pas une, car vus les prix qu’il pratique, on l’imagine plutôt vénal. Dave et Benji en profitent pour racheter des barres de céréales, ils ont peur d’en manquer sur la fin d’Épopée. Ils les paieront à vil prix pour rien car finalement ils ne manqueront de rien.
Les éclopés

Tout se passe plutôt pas mal en cette matinée, et le décor est magnifique. 
On passe à un moment donné devant une sorte de cathédrale/église/grosse chapelle, avec une porte gothique très sympa. On s'arrête pour un petit selphie.
De beaux gosses devant de belles choses

Peu de temps après, on passe devant une autre grosse batisse. Le logo représenté ne laisse pas l'ombre d'un doute aux connaisseurs de notre groupe : c'est la Abbaye de Maredsous. On s'arrête donc évidemment pour des photos. On hésite à stopper pour boire un verre, mais on ne veut pas gâcher le fait qu'on soit plutôt dans les temps sur notre parcours.
Il y a pourtant de la place pour s'asseoir

C'est marqué dessus

On continue notre chemin et les paysages continuent à nous subjuguer. À un moment, avant d’entrer dans la forêt, on aperçoit des ruines énormes et majestueuses sur notre gauche. Je dis aux copains proches de moi que je ne serais pas surpris de voir surgir un Nazgühl, les espèces de spectres du Seigneur des Anneaux. À peine ai-je prononcé ces mots que nous entendons dernière nous un sifflement, ressemblant à s’y méprendre au cri de ces créatures. « En voilà un ! » m’écriai-je ! En fait, il s’agit de Francky qui vient de crever un pneu, et le bruit provient de l’air s’échappant rapidement de la petite fuite. Il s’agit d’une crevaison par pincement, donc sans doute un pneu pas assez gonflé.
On s’arrête donc pour prêter main forte à notre ami pour ce qui constitue le premier arrêt mécanique de la journée. Attention, cela ne veut pas dire qu’il y en aura d’autres, hein ! Peut-être que désormais on va être chanceux, qui sait.
"prêter main forte" qu'il disait... regarder, plutôt

La troupe avance sereinement et on commence déjà à se rapprocher de Dinan quand Fab commence à avoir très très faim. Et quand ça lui arrive, ça devient une obsession. Aussi, quand on entre dans une petite bourgade qui a l’air bien paumée, il propose qu’on fasse un détour pour trouver à manger, histoire de ne pas se faire piéger comme au premier jour. Il ne trouve aucun soutient pour appuyer sa requête et se voit contraint de nous suivre. Il ne reste pas 10 bornes pour Dinan, ce serait ballot d’arrêter maintenant. 
Il est quand même 13h, et je téléphone pour réserver le repas du soir. Quand j’indique que je souhaite arriver pour 20h30, on me répond qu’en cette saison c’est service réduit, et donc c’est 19h dernier délai. Va pour 19h, mais il ne faudra pas qu’on perde trop de temps.
Il est pas loin de 13h30 quand, dans une partie sous-bois globalement descendante et roulante, on entend derrière nous « merde !!!! » Le cri provient de Benji. Quand je me retourne, je vois Benjou debout, la jambe écorchée, et les sacoches par terre. Je soupçonne que son mega porte-bagage ultra pratique clic-clac a rendu l’âme. Mais non, c’est sa tige de selle qui s’est brisée. Le poids du Benji, le fait que la tige soit très sortie, plus le poids vers l’arrière du sac qui est entièrement soutenu par la tige, ont eu raison d’elle. Elle s’est littéralement scindée en deux. Benji est furieux et je le comprends. C'est quand même pas possible qu'on soit maudits à ce point. Même des éléments aussi cons qu'une tige de selle ne vont pas résister à notre Epopée ? Par chance, la rupture s’est faite plus haut que le collier, et à l’aide de la pince de Faby, j’arrive à extraire le morceau resté dans le cadre. On réinsère le reste de la tige, mais bien enfoncée pour ne pas qu’elle recasse, et on se dit qu’on trouvera bien un bouclard à Dinan. Benji nous indique qu’il ne se voit pas faire les 10 bornes restantes là-dessus, avec les genoux à côté des oreilles, que ça va lui cramer les pattes, etc... David le bon samaritain arrive à sa rescousse. Il remonte la selle de son Spectral qu’il prête à Benji, et enfourche la monture de notre belge. Nous voilà reparti en destination de Dinan, mais petit à petit, l’heure avance.
C'est pété propre et net

Ca fait plus beaucoup de tige sortie

On arrive à une super descente pleine de virages en épingles (avec marches) sur laquelle on adorerait s’amuser, mais entre ceux qui n’ont pas leur vélo, ceux qui n’ont pas la technique, ceux qui ont eu des galères techniques et ne veulent pas rééditer, et ceux qui ont mal au tendon, bin ça laisse plus grand monde pour faire le foufou. On descend donc très prudemment, tout en essayant de prendre du plaisir là où on peut.
Directement après cette descente se dresse la première saleté à gravir, la pire selon le profil. Comme attendu, il va falloir pousser le biclou. Heureusement, cela démarre sur des pavés, pour ensuite enchainer sur du chemin de terre, mais suffisamment large pour qu’on puisse pousser le vélo sans trop de problème. Ça reste bien fatigant, surtout pour Faby à qui ça fait siffler le tendon. Néanmoins ça se monte sans vraiment de problème.
Ca grimpe raide

Une fois en haut, il ne reste plus qu'à redescendre vers Dinan et on peut enfin manger. Ca démarre sur bitume et on lâche les freins parce qu'il est déjà 14h30. Je blinde en tête de groupe, suivi par Benji, lorsque j'entends mon GPS qui braille. Je m'arrête et constate que j'aurais du quitter la route pour un chemin un peu plus haut. A ma gauche, je vois Dinan : il suffit de finir la descente et on y est. De moins en moins extrêmiste avec la Trace, je n'imagine par remonter. Seulement, il n'y a que Benji qui m'a suivi. J'appelle les autres par téléphone : Lieutenant Fab ne s'est pas vautré et a pris le bon chemin. Je consulte la Trace et m'aperçoit qu'elle revient sur la route où Benji et moi nous trouvons. Nous décidonc donc de nous retrouver à l'intersection, ceux étant sur la Trace ne voulant pas rebrousser chemin. On descend donc Benj et moi jusqu'à l'intersection. Quand on voit la gueule du chemin par lequel les copains vont nous rejoindre, on explose de rire : ça a l'air peu utilisé, très broussailleux, voire ronceux. On prend quelques photos de Dinan en attendant, et quand nos copains arrivent enfin, on prend aussi des photos d'eux car leurs têtes sont édifiantes. Je pense qu'ils auraient préféré se gourrer également.
Dinan c'est joli

Oh il a l'air content le chef !

Francky aussi a l'air ravi

Allez un p'tit sourire les gars !

Il est 3h environ quand on arrive à Dinan. C'est vraiment très joli.
Depuis le pont, sur la gauche

Depuis le pont, à droite

Depuis le pont, derrière
Benji voudrait commencer par réparer son vélo, mais les autres lui font remarquer que ça va être déjà chaud pour trouver un endroit où manger. On commence donc par chercher où se substanter.
Nos héros trouveront-ils un resto ? Benji pourra-t-il réparer son vélo ? La deuxième montée sera-t-elle aussi dure que la première ? Les réponses à ces questions dans le prochain post !!! (vous vouliez du cliffhanger, là je vous le fais façon old school).

vendredi 28 juillet 2017

Epopée (jour 2 - part 2) : seconde chance (version non censurée)


Je suis donc enfin à nouveau sur mon vélo, avec mes copains, moins de 24h après le « drame ». Que d’émotions en si peu de temps. Pendant la première heure, je vais être attentif à tout bruit provenant de mon vélo. J’ai tellement peur de recasser un truc. Mais au bout d’un moment, il faut que je me rendre à l’évidence : tout est bon, je peux enfin être soulagé et profiter pleinement de l’aventure. Cette expérience m’aura couté 30 km que je n’aurais pas pu faire, et quelques euros, par contre elle me permettra de profiter encore plus de l’Épopée. À partir de ce moment-là, quelle que soit la galère, je me rappellerai toujours de la chance que j’ai de pouvoir vivre cet instant, car tout aurait pu s’arrêter. Aussi, quand on se retrouve à traverser les orties et les ronces, pour ensuite devoir emprunter un escalier, je trouve presque cela plaisant. Ce n’est pas le cas de tout le monde et on entend Benji brailler comme un cochon qu’on écorche (mais dans la bonne humeur, chacun sa façon d’exorciser la douleur). Quand on arrive en haut de l’escalier bien long et étroit dans lequel le portage du vélo n’aura pas été facile, je prends une petite vidéo afin de pouvoir à jamais conserver une trace de l’émotion que j’ai. On vient de traverser des orties, de porter des vélos lourds comme des chevaux morts dans des escaliers, mais je m’en fous, car je suis sur mon vélo avec mes copains.
Benji dans l'escalier

Pendant que les autres en finissent avec les orties

Il nous reste encore pas mal de bornes à faire cette après-midi, car on est parti tard le matin, et en plus c’est l’étape la plus longue de l’Epopée, avec plus de 80 km à parcourir.
On roule donc à bon train sur une chaleur assez forte. D’ailleurs les copains commencent à se trouver à court d’eau et on s’arrête à une maison où le propriétaire est dehors pour lui demander de recharger les gourdes. Benji lui demandera s’il a un « Sterput’ » afin que nous puissions voir de quoi il s’agit, sachant que la veille il nous avait expliqué pouvoir boire tout et n’importe quoi, tel un véritable Sterput’. Il s’agit en fait d’une sorte de bouche d’évacuation de liquide qu’on trouve dans les caves et les garages. Il demandera ça plusieurs fois dans l’aventure, provoquant en général la surprise de son interlocuteur ("vous avez un Sterput' ?").
Une petite descente se profile dans la forêt. Je suis en train de papoter avec Francky à l’arrière quand nos autres amis se jettent à corps perdu dedans. Je dis à Francky qu’on continue la discussion en bas et je me lance comme un pété dans ce chemin tortueux. Quelques racines et aspérités dans le terrain incitent à l’attaque, voire au saut. D’ailleurs, il y en a un sympa qui se présente devant moi, mais mes 3 copains sont arrêtés juste après et me hurlent des trucs. Je soupçonne qu’il vaut mieux ne pas y aller, du coup j’esquive. En effet, Faby y est allé un peu trop joyeusement et a largué son bagage au passage. La plate-forme en plastique qui est posée sur la partie métallique s’est désolidarisée, comme ça m’était arrivé au Périple. Il raccroche correctement et on convient de mettre du renfort (comprenez de gros rilsan) demain matin. On en profite pour prendre une petite photo de Benji qui s'est camouflé façon commando un peu involontairement apparemment.
Si on ne sait pas qu'il est là, on ne le voit pas

Il fait beau en cet après-midi, et même un peu chaud. Alors qu’on passe à côté de prés, les vaches nous regardent foncer sur nos machines. Chaque fois qu’on en croise, on lance le cri des chacals (Muuuuuuuuh !!!). Oui, le cri des Chacals est un mugissement, mais ce n'est pas le sujet du jour. Tout le long de cette semaine, ça ne manquera pas : Benji, Faby et moi, on adore mugir. Le Chef, lui, ce qu’il adore, c’est ôter son t-shirt quand il y a du soleil. Évidemment il fuit quand j’essaie de le photographier, surtout qu’avec son cuissard dentelle, il est trop sexy pour son chat. Il finit par me laisser capturer cette belle image, car il sent bien que sinon je ne vais pas le lâcher de toute l’Épopée. Comme c'est la version soft du post, je ne mets pas la photo immédiatement, j'attends son accord (mettez-lui la pression, il donnera son aval -> aval reçu, voici la photo).
I'm...too sexy for my cat...
En fin d’après-midi, on croise un petit canal, avec des péniches, il fait beau, et face à ce joli paysage, il y a un bar avec terrasse. On n’y résiste pas et on s’installe afin de se faire servir des AA (bière d’Abbaye d’Aulne). Elle est bien fraiche et elle viendra, comme il se doit, avec sa petite sœur. Après avoir demandé au patron de nous prendre en photo (et s’il a un Sterput’), nous remettons en route avec la ferme intention de ne pas arriver trop tard, même si on sent bien qu’on ne va pas être de très très bonne heure. J’appelle d’ailleurs nos hôtes pour les prévenir mais c’est le répondeur qui me répondra et qui ne transmettra pas mon message.
Graphiquement, un petit noir entre deux larges blancs, c'est pas mal

Francky déjà prêt à repartir

Trinquons (Francky sort toujours couvert)

On est proches de l’arrivée lorsque le destin nous rappelle qu’il peut faire de nous ce qu’il souhaite. Fabrice casse sa chaine. Pause forcée en pleine montée pour tout le monde. David et moi portons secours au Fab, pendant que Francky et Benji se reposent un peu. Il faut dire que sans être trop exigeante, cette étape est longue. Et comme en plus on a un peu accéléré le rythme, on commence à ressentir la fatigue.
Fab a encore des gants de réparation à ce moment là

La fatigue commence à se faire sentir

Une fois la chaine réparée, on reprend notre route. On se dit que les derniers km sont les plus durs, et comme hier, on a hâte d’arriver. 
Avant de vous raconter l'arrivée, je ne résiste pas à l'envie de poster d'autres photos prises dans la journée. Je ne sais pas à quelle occasion a été prise la première. Par contre la deuxième c'est pendant que Fab répare sa chaine. Dans les deux cas, on peut dire que le Chef apprécie beaucoup Faby et qu'il doit m'envier la place de colocataire de notre libertin suave.

Devine qui c'est ?
Le Chef arrive à ta rescousse
On entre enfin dans Fromiée, ville étape, et nous arrivons sur les coups de 20h au gîte la Haie des Loups, où Michelle et Michel nous accueillent comme des rois. Je me félicite d’avoir pris la formule table d’hôte car au moins, une fois qu’on est posés, on n’a plus à bouger.
Michel nous propose de mettre les vélos dans la cour, et comprend vite à nos mines qu’on attend un rangement un peu plus sûr. Il finit par sortir des trucs de sa cabane de jardin pour qu’on puisse y mettre nos montures. Comme certains d’entre nous sommes un peu précieux avec nos machines, je m’occupe de les poser pour éviter qu’elles ne reposent métal sur métal. J’utilise la technique dite de la pédale sur le pneu, qui a fait ses preuves. Je rentre donc tous les vélos un par un, et il ne reste que celui de Dave qui traine un peu à virer ses sangles. Il a des mouvements très désordonnés et franchement il met des plombes. Je suis un peu surpris et je me rends compte qu’il a l’air explosé. Décidemment, cette fin d’étape était vraiment crevante apparemment. En fait, il nous apprendra plus tard qu’il était sans doute déshydraté, et du coup il sera assez calme toute la soirée.
Une fois les vélos rangés, Michel nous propose une bière, qu’on ne refuse évidemment pas. On sait se tenir ! Du coup quand il en propose une deuxième, on l’accepte également. Seul le Chef refuse pour aller prendre la douche. Les autres préfèrent boire. On enchaine sur le repas dès que Dave revient, qu’on prendra dehors avec nos hôtes avec qui nous discutons gaiement. Quel contraste avec la veille où Philippe n’était même pas sorti de sa chambre ! Ici Michel nous parle des traditions du coin, de ces journées déguisées en armées napoléonienne avec des haches en laiton qu’il passe des heures à briquer, et des petits vins qu’il nous sert et qu’il a choisi avec soin. De son côté, Michelle nous a préparé un excellent repas dont elle ne révélera pas la recette malgré la demande de Faby et nous propose de laver nos vêtements de vélo. Le grand luxe !
Chez Michelle et Michel

Nous finissons notre repas repus, un peu éméchés par les bières et le vin, et nous montons dans nos chambres respectives afin de nous doucher et nous coucher. Fab et moi formons déjà un vieux couple, l’un étant aux WC pendant que l’autre prend sa douche dans la même pièce.
Fab est encore aux WCs pendant que je me tartine les fesses de crème à cul dans la chambre. Et oui, en à peine 2 jours de vélo on commence déjà à avoir des échauffements et le mieux est de traiter ça très vite. Benji tape à la porte pour venir chercher un truc. Je lui dis d’entrer et il ne regrette pas le déplacement : face à lui, moi le cul en arrière en train de me tartiner, à sa gauche le Fab sur le trône. On explose de rire. Benji est obligé de battre en retraite pour se calmer, revient, réexplose de rire, repart, etc... Un peu comme Francis Huster dans le dîner de con, mais en mieux joué.
Après cette bonne tranche de rigolade, on se couche assez vite et on ne tarde pas à s’endormir. Je suis réveillé « en pleine nuit » (en fait peu de temps après le début de mon sommeil) par le Fab qui semble vider toute sa quincaillerie. Je râle « Putain mais qu’est-ce que tu fous ? Tu déménages ? ». Lui me répond : « Tu ronfles pire que Benji ! Je cherche mes boules quiès ! ». Un vrai couple j’vous dis ! Il faut reconnaitre que chez moi, souvent, fatigue + alcool = ronflements d’ours polaire. Je ne traine pas à me rendormir, et même si je me réveille souvent car j’ai trop chaud et soif (chaleur + alcool = trop chaud et soif), je passe une bonne nuit, avec la sérénité de celui à qui il ne peut plus rien arriver... rien vous avez dit ?

jeudi 27 juillet 2017

Epopée (jour 2 - part1) : à la recherche d'un dérailleur



On se réveille avant l’alarme. La faute à la lumière qui rentre par la fenêtre, ou peut-être le sommeil agité. Lorsqu’on descend, on trouve Francky dans le salon. Il nous annonce que Philippe est là et qu’il est parti chercher « un » pain. Je demande pour m’assurer s’il n’a pas dit « le » pain, ou « du » pain, mais Francky m’affirme que c’est bien « d’un » pain dont il s’agit. J’insiste un peu sur la notion car Philippe nous a promis lors de nos échanges d’email un petit déjeuner de champions. Littéralement, il a écrit « - y a pas de petit déj inclus mais moyennant un suplément de 5€/personne, je peux vous organiser quelque chose de costaud ». On s’attend donc à quelque chose d’à peu près sérieux.
Lorsqu’il revient, il a effectivement acheté un pain. Un beau pain rond, mais unique qui semble faire léger pour les 5 morfales que nous sommes. On le voit ensuite s’activer en cuisine. Il lance des cafés à la senséo et en même temps que le café coule, il bricole quelque chose au-dessus de la poubelle. En fait, il est en train de virer le pourri qui s’est formé en haut des pots de confiture. Et vu le bruit que ça fait, il y en a une belle quantité. On se retrouve attablé pour le petit déjeuner des winners, avec un café, un verre de jus de fruit, deux tranches de pain chacun et de la confiote pourrie. Francky demande du beurre et Philippe lui en trouve après recherche : il est périmé de plusieurs semaines... Je ne veux pas être mesquin, mais franchement pour 5€ par tête de pipe, il se fout un peu de notre tronche là. Il aura quand même la mansuétude de proposer à café à mon frère quand il arrive pour me conduire au magasin, mais apparemment il fera un peu la tête quand l’un de mes comparses demandera un second café un peu plus tard.
Je ne m’attarde pas trop longtemps au petit déj de toute façon, car dès que David est là, on siffle le café et on file vers le magasin de Mons. Je suis fébrile dans la voiture. Pensée positive, bordel !!! 
On se gare devant juste lorsque les rideaux s’ouvrent. Le vendeur a l’air surpris de voir quelqu’un débarquer aussi tôt. Je lui demande s’il vend des dérailleurs SRAM 11 vitesses, quelle que soit la gamme. La réponse est directe, ferme et sans appel : il n’en a pas. Il m’explique qu’avec les nombre de références actuelles, il ne peut pas tout avoir en stock. Je lui explique qu’avoir un modèle de chaque grand marque (SRAM et Shimano) dans chacun des formats (7-8, 9, 10 et 11 vitesses) cela ne l’encombrerait pas tant que ça et ça permettrait ce genre de dépannage. Lui de me répondre que ce n’est pas un souci, que je peux commander et que dans 2 jours il l’aura. Si je commande par probikeshop, je peux me faire livrer le lendemain avec l’option express, et ça me reviendra toujours moins cher qui je le prends chez lui. Hey les bouclards ! Faut se réveiller ! Si vous voulez survivre, il faut proposer un truc en plus ! Si vous n’avez pas de stock et que pour acheter chez vous ça coute plus cher et c’est plus long que de commander sur le net, comment voulez-vous nous convaincre de passer par vous ? Le conseil vous me direz ? Laissez-moi rire ! Souvent les types essaient de vous revendre leur came, pas de vous aider à choisir ce qui vous convient le mieux.
Je sors donc du magasin totalement déçu. Mon dernier espoir s’évanouit. Je me dis que Fab va me reprocher mon manque de pensée positive qui a fait que le type n’en avait pas en stock. On remonte dans la voiture de Dav, et on se dirige vers la maison de Philippe. L’idée c’est de dire aux autres d’y aller, et nous on ira au bureau de David qui se trouve non loin pour chercher une autre solution.
Les copains sont en train de préparer les biclous quand on arrive. Ils sont déçus de notre déconvenue. C’est Fab qui fera office de lieutenant en mon absence (comprenez par-là que c’est lui qui indique le chemin). Première fois qu'il est laché tout seul avec cette responsabilité, les autres tremblent un peu, lui mesure la grandeur de sa mission. On ne s’attarde pas, on file au boulot de Dav.
On monte dans son bureau et pendant qu’il règle quelques soucis de travail, je regarde sur le net ce que je peux trouver. Séverine, ma belle-soeur, qui travaille avec mon frère, me propose un café, mais je refuse car j’ai l’estomac noué. Je ne peux rien avaler. Je me sens même un peu malade.
Je vérifie une chose aperçue hier : chez decath ils ont des modèles en GX et NX en référence. Il n’y a pas de prix et ce n’est pas dispo sur le net, mais c’est indiqué. J’appelle donc au magasin de Mons, puis à celui de Valenciennes, pour recevoir la même réponse : non ils n’en font pas, en tout cas pas encore. Ils ne sont même pas au courant que c’est sur le site. Je commence à désespérer.
Je m’absente pour aller aux toilettes (détail important, n’est-ce pas, mais rappelez-vous que je ne me sentais pas bien... Et puis si, je vous assure, vous allez voir que c’est important) et quand je reviens, mon frère m’indique qu’il a fait une recherche avec des mots clés différents (« cycles hainaut », car le Hainaut est la province s’étendant à la fois sur la France et la Belgique dans laquelle on se situe) et qu’il a trouvé un magasin apparemment ouvert aujourd’hui (et fermé demain) proche de Charleroi, donc à une bonne grosse cinquantaine de kilomètres d’ici. Il me dit d’appeler, que non ce n’est pas trop loin, et qu'il me conduira où il faut de toute façon.
J’appelle donc, et une dame me répond. Je lui demande si elle a en stock des dérailleurs SRAM 11 vitesses. Elle me demande si c’est un dérailleur avant ou arrière que je recherche. Ça ne choque peut-être pas les non-initiés, mais 11 vitesses à l’avant... bin ça n’existe pas, ou alors sur des protos chelous. Je ne me fais donc pas trop d’illusions sur les connaissances techniques de mon interlocutrice et mon mince espoir s’évanouit assez rapidement. Elle me dit alors qu’elle me passe son collègue qui s’y connait « mieux » qu’elle. Je repose donc ma question. Le collègue me répond qu’il en a 1 en stock, un GX. Je lui dis que je le prends. Puis je lui demande le prix, me disant que mon empressement m’a probablement coûté une surcote non négligeable. Mais non, le prix annoncé est décent. Je sens un poids s’enlever de dans mon ventre. Mais je ne suis pas encore sauvé, car il me faut un nouveau plateau aussi. Je lui demande donc « plus tricky... Avez-vous des plateaux en direct mount ». Ce sont des plateaux vraiment spécifiquent, qui se montent directement sur les pédales sans l'intermédiaire d'une étoile (le montage courant) et le plateau dépend également de l'empreinte de la pédale (les SRAM sont très spécifiques, mais les plus répandus). Et là, sa réponse m’ôte tout doute concernant ses compétences. « Offset 3 ou 6 ? ». Il me faut du 6, mais à ce moment-là je pense qu’un 3 devrait pouvoir faire l’affaire. Je lui réponds donc du 6 et il me dit : « ah dommage !!! En 3 j’ai plein de choix. En 6 je n’en ai qu’un ». Oh que je m’en moque, tant qu’il en a 1 ! Ce plateau pourrait être en 38 dents (je roule en 26 et plus il y a de dents, plus c’est dur en montée) que le prendrais quand même ! Et quand il me dit que ce plateau est en 28 dents, je serais prêt à l’embrasser par le combiné. "Un détail néanmoins, me précise-t-il, ce plateau n’est pas rond. C’est un plateau elliptique". Ce sont des plateaux spéciaux, censés optimiser le pédalage, mais cela reste très contreversé. Mais c’est encore mieux, j’étais justement curieux d’essayer. Je lui indique donc que je le prends, cette fois sans demander le prix parce que de toute façon je sais que je vais le prendre. Je lui demande de me le mettre de côté. Je lui demande s’il pourra me monter le tout, et là c’est un refus. Il a trop de taf en atelier actuellement. Je lui explique mon histoire et le fait que je ne dispose pas d’outil pour démonter le pédalier, du coup il accepte de monter le plateau, mais il faudra que je gère le dérailleur moi-même. Pas de problème, je sais faire !!!
Je raccroche, et pour la première fois depuis ce qui me semble des lustres, je souris. Mais genre je souris avec plein de dents. Je n’arrive pas à y croire : je vais pouvoir réparer le biclou. Je suis tellement content, et je crois que ça se voit car Sev et Dave affichent également un large sourire. Et là vous comprenez que c’était important que j’aille aux toilettes, car si je n’y vais pas, David ne fait pas sa recherche. Pas de recherche, pas de trouvaille de magasin, pas de magasin, pas de matos, pas de matos, pas d’Épopée !!! On me reproche souvent mon côté pipi/caca, mais c’est parfois salvateur !
On embarque vite fait dans la camionnette, et on file vers Charleroi. Le trajet dure bien 45 minutes, pendant lesquelles je me décontracte un peu, mais je reste prudent. Tant que le vélo n’est pas réparé, je reste prudent. On profite de ce trajet pour papoter entre frangins et j’apprécie pleinement le moment. En même temps qu’on échange des anecdotes sur ce qu’on a fait ces derniers mois, je réalise à quel point je suis chanceux d’avoir une telle famille, avec laquelle je m’entends super bien, et sur laquelle je peux compter. Je l’ai toujours su, ce n’est pas quelque chose que je découvre, j’ai toujours été convaincu que je pouvais compter sur mes parents ou sur mes frères. Mais là je l’ai vécu. Et mon frère est en train de me sauver mon Épopée. Je suis probablement en train de vous bassiner avec tous ces beaux sentiments que j’ai déjà exprimés dans le post précédent, mais il faut que vous imaginiez la gratitude que je ressens à ce moment. Je n’ai pas eu le temps de demander quoi que ce soit qu’il s’était déjà arrangé pour libérer sa matinée. Lui et mon petit frère étaient prêts à me filer leur vélo pour toute la semaine sans aucun soucis. Et mon père m’a indiqué à plusieurs reprises que je pouvais l’appeler pour venir m’apporter un truc n’importe où dans la semaine.  Et je sais que chacun d’entre eux était sincère. Je ne doute pas que ma mère serait prête à rouler de nuit pour moi (elle déteste ça) et la veille Zouzou était prête à me ramener mon autre biclou depuis la Lorraine. À ce moment précis de l’aventure, je mesure toute la chance que j’ai d’avoir cette famille à mes côtés.
Arrivés aux magasins, j’achète les pièces, ainsi qu’une chaine qui me coûte un rein (dire qu’on s’est moqué de Fab qui initialement avait pris une chaine de secours dans son sac de 10 kg) et des maillons attache-rapides. La facture est salée, mais je m’y attendais. Je monte méticuleusement le dérailleur dehors, puis je vais voir pour que le monsieur me monte le plateau. Il m’indique de rentrer mon vélo. Je vois bien qu’il fait un peu la tronche en voyant que c’est un Canyon, la marque détestée par le vélocistes car vendue exclusivement en direct sur le net. Mais il ne dit rien et fait le montage quand même. Je sens bien qu’il est moins loquace, mais il fait le travail proprement (sous mon regards scrutateur). Je finis le montage sur le parking : longueur de chaine, réglage de tension du dérailleur, butée basse, tension du câble, butée haute. Je fais un ou deux tours sur le parking pour tester le tout et affiner le réglage de tension. Les vitesses passent parfaitement. Tout a l’air ok. Le vélo est réparé. 
Je n'ai malheureusement pas de photo de ces moments, j'étais trop préoccupé par la réparation du biclou que je n'ai pas pensé à sortir le téléphone pour graver ces images.
J’appelle les copains pour leur annoncer la bonne nouvelle. Je les entends exulter de joie. Eux aussi ont vécu cette galère avec lourdeur et mon abandon leur aurait pourri l’aventure. Fab m’a même annoncé qu’il n’imaginait pas continuer sans moi.  Je regarde où ils sont et où on pourrait se retrouver, et le point de rendez-vous idéal est un petit village nommé Merbes Le Chateau (commune d'Erquelines). David et moi y arrivons les premiers et on cherche un endroit pour manger. Évidemment tout est fermé, mais dans un bar on m’indique que les pistolets (sandwitch) de la supérette sont très bons. Bon bin ça fera l’affaire. 
Les pistolets y sont très bons

Les copains arrivent et quand je les vois apparaitre au bout de la rue, ça me fait tout drôle. Déjà, je me rends compte que c’est vrai que ça claque de voir 4 gugus arriver avec les mêmes maillots (quand on était 11 ça devait vraiment déchirer, on ne se rend pas bien compte quand on fait partie de la troupe). Et puis je me dis que je vais retrouver ma place dans l’équipe. 
On va acheter les fameux pistolets qui sont en effet excellent. Dans la supérette ils ont des bacs au frais avec des préparations de type filet américain. On prend ça avec une bière et on se restaure assis sur la margelle d’une fontaine à côté. 
Sandwitch and beer

Pique-nique dans la rue

La bonne humeur est revenue et on débriefe de la nuit et du petit déj chez Philippe en rigolant. On espère que les hébergements suivants seront mieux et je leur promets que le petit déj du lendemain devrait changer du tout au tout. Ils me racontent leur matinée, leur traversée de hameaux de Rintintous, leur passage dans les ronces. Ils ont fait 30 km pas trop compliqués d’un point de vue relief, mais avec quelques obstacles végétaux apparemment. On finit le repas par un donuts, puis je remonte mon porte-bagage sur le biclou. J’accroche mon sac, et c’est officiel : je suis de retour dans la danse !
Je remonte le porte-bagage

On bricole le porte-saucisson

Fab commence à ressentir une gêne

Je remercie une dernière fois mon frère, et nous mettons en route. Il nous regarde partir, avec un peu de regret : l’aventure s’arrête ici pour lui, en tout cas pour le moment. Il nous avait proposé de conduire le camping-car dans le cas où on n’aurait pas trouvé d’hébergement, et je pensais qu’il n’était pas sérieux. En fait, il l’était carrément, et encore plus aujourd’hui. Si d’aventure on devait organiser un nouveau périple, il serait directement volontaire pour faire chauffeur. Il souhaite juste qu’on fasse cela en début juillet pour qu’il puisse suivre l‘étape du Tour en nous attendant l’après-midi. Mon père serait également intéressé. Pourquoi pas... on note l’idée pour plus tard.
C'est par là